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Guillaume Moriano, CSM chez Heropolis, interview Marc Fesler, Président de CARINEL


Bonjour Marc, pouvez-vous vous présenter, vous et Carinel ?

Bonjour,

J’ai un parcours un peu atypique qui m’a permis d’évoluer à la fois dans le monde de la sécurité publique et dans celui des services, au sein de grandes entreprises.

En tant qu’ancien militaire, j’ai développé une compréhension concrète des enjeux de la sûreté. Je reste d’ailleurs convaincu que l’expérience du terrain est absolument indispensable dans notre métier. Le monde des services m’a permis de structurer la gestion des projets et de prendre de la hauteur dans l’analyse des risques. Côté hobbies, je suis pratiquant et professeur de Krav Maga.


Carinel est un cabinet de conseil en sûreté. Nous accompagnons les entreprises et les institutions publiques sur la prévention et la gestion des actes de malveillance, de violence, de harcèlement, de déviances et de radicalisation.

Nous intervenons sur la conception des stratégies et politiques de sûreté, sur l’analyse des risques, les audits de sites, l’évaluation et la priorisation des solutions de mitigation des risques, le pilotage et l’accompagnement au changement de leur mise en œuvre, la formation, le maintien en condition opérationnelle et l’amélioration continue.


Fort des éléments présentés dans cet article, pouvez-vous dire à nos lecteurs, comment Carinel œuvre pour la prévention des situations de violence auprès de ses clients ?

Pour vous donner un exemple concret, je vais vous parler de ce que nous avons pu réaliser pour les hôpitaux, car c’est la situation qui m’a le plus marquée au cours des dernières années. Nos soignants sont confrontés quotidiennement aux incivilités et aux violences. C’est naturellement au sein des services d’urgence que la situation est la plus criante.

Quand nous intervenons au sein d’un hôpital, après avoir établi le contexte et les objectifs de notre intervention avec la direction, nous cherchons rapidement à écouter le personnel. Face la régularité des incivilités, tout le monde ne réagit pas de la même manière. Certaines personnes se résignent et absorbent la violence, d’autres sont épuisées, d’autre encore sont nerveuses et perdent patience. Il est important de libérer la parole parce que c’est nécessaire pour le personnel qui subit les violences et parce que cela nous permet d’appréhender le niveau d’insécurité ressenti.

Au-delà des interviews des personnels soignants, nous procédons à une analyse des risques détaillée. Nous intervenons à la fois sur l’évaluation des procédures existantes : gestion d’un patient agressif, mise en sécurité du personnel, enregistrement des événements…, l’analyse des contrats passés avec des sociétés de sécurité : vidéosurveillance, agents de sécurité et sur l’observation des lieux : contrôle d’accès, positionnement des caméras, capacités d’alerte et de mise en sécurité…

Sur la base de l’audit, nous formulons des préconisations d’actions, et d’indicateurs de performance associés, ordonnées dans le temps, en priorisant les solutions pouvant apporter une efficacité dans un temps proche pour un coût limité. L’objectif est d’engager une action concrète pour communiquer sur l’amorce d’un changement visible. L’accompagnement au changement est d’ailleurs un axe capital de notre travail. Il peut se matérialiser par des actions de communication : réunions d’information, communiqués, affichage… et des actions de formation : séances plénières, e-learning, exercices de mise en situation. Les solutions mises en œuvre sont autant organisationnelles que matérielles. Elles vont de la création ou l’adaptation de procédures à la mise en place de solutions digitales d’alerting comme celle de Heropolis.

Quelques mois après la mise en œuvre des solutions, nous proposons une analyse d’écart des indicateurs pour nous assurer de l’efficacité obtenues et des éventuelles corrections à opérer.

Face à des publics parfois difficiles, traumatisés par un accident, en grande précarité, ou encore sous l’effet de l’alcool ou de stupéfiant, on ne s’étonne pas que les soignants soient confrontés aux incivilités et aux violences. Ce qui est plus étonnant, c’est d’une part que la tendance semble être croissante, et d’autre part qu’elle apparaît dans d’autres secteurs d’activités : agents sociaux, personnel des transports en commun, mais aussi agents bancaires, conseillers commerciaux. Globalement, tous secteurs confondus, les personnels en contact avec le public nous remontent des problématiques croissantes d’incivilités. La méthodologie que nous appliquons pour les hôpitaux et d’ailleurs globalement adaptable aux autres secteurs, modulo la prise en compte de leurs spécificités intrinsèques.


D’accord, grâce à ça nous avons les moyens d’anticiper et de prévenir, mais si une situation de violence, une agression contre un guichetier de banque par exemple, venait à éclater, que conseilleriez-vous de faire et comment accompagneriez-vous ce client ?

Il faut commencer par analyser méthodiquement les causes qui ont amené la violence. On peut faire face à une personne déséquilibrée qui aurait pu agir de la même manière dans un autre lieu, mais on observe régulièrement des raisons concrètes qui font monter la tension et amènent à des incivilités ou à de la violence : le client subit un défaut de service (une problématique commerciale, un temps d’attente…), ou encore le conseiller n’est pas en mesure de répondre à ses attentes (il a un problème d’accès informatique, il n’est pas habilité à prendre le type de demande, il n'a pas connaissance du moyen de résolution…). La prévention des violences ne commence pas forcément avec la mise en place de solution de sécurisation. C’est avant sur le service rendu qu’il faut commencer à travailler.


Il faut ensuite observer si le conseiller avait la possibilité de désamorcer les tensions. Au-delà du service rendu, existe-t-il des procédures pour gérer ce type de situation ? L’employé est-il formé ? Un collègue, un agent de sécurité, un manager auraient-ils dû être alertés, auraient-ils pu intervenir ? L’agent avait-il des moyens techniques pour alerter, pour se mettre en sécurité ? L’agresseur était-il déjà entré en contact auparavant, avait-il déjà montré des signes d’agressivité, l’événement avait-il était correctement enregistré ? Nous remontons donc toute la chaine de l’événement et par des interviews, une analyse documentaire et un audit de site, nous observons pas à pas ce qui existe, ce qui peut être amélioré, ce qui doit être construit. C’est sur cette base que nous construisons nos préconisations.


Quel serait votre conseil pour faire face aux conséquences à la suite d’une agression ?

Au-delà de son obligation légale d’assurer la sécurité des employés, la direction doit rapidement montrer son implication et sa détermination à protéger ses employés, par une communication claire, une prise en charge immédiate et un plan d’action suivi et partagé.

Les victimes doivent être écoutées et accompagnées. Il peut s’agir d’un soutien psychologique, d’une aide au retour en cas d’absence liée à l’événement, d’une aide au dépôt de plainte.

L’analyse de l’événement doit être effectuée le plus rapidement possible. C’est peut-être une évidence mais la transparence est importante : il ne faut pas masquer les problèmes. Un plan d’action concret doit être mis en œuvre. Ses résultats doivent être mesurables, suivis dans le temps et partagés avec le personnel.


Avez-vous des conseils, des outils, des moyens peut-être à communiquer à nos lecteurs pour améliorer leur sûreté dans l’immédiat ?

Il n’y a pas de conseil générique à donner avant d’évaluer précisément chaque contexte client. Il faut d’abord analyser les risques auxquels il est susceptible d’être confronté, les changements en œuvre dans son organisation potentiellement impactants, et sa culture de sûreté. Le moins efficace en matière de sûreté est de se lancer dans la mise en œuvre d’une solution technique, typiquement de contrôle d’accès ou de vidéosurveillance, avant d’avoir établi le besoin et les freins potentiels à l’utilisation.

Toute solution de sécurisation doit répondre à un besoin concret, être acceptable par les usagers, être accompagnée dans sa mise en œuvre et produire des résultats mesurables.


Dans quel cadre contacter Carinel ?

Nous sommes régulièrement contactés pour répondre à un besoin de mise en conformité réglementaire ou à la suite d’un événement. Notre conseil est surtout de nous contacter de manière plus préventive. Toute organisation quelle que soit sa taille peut être confrontée à des problématiques de sûreté. Mieux vaut penser les problèmes en amont. Nous pouvons accompagner les entreprises dans la rédaction de leur politique de sureté en établissant un cadre très concret.

Notre deuxième préconisation est de nous contacter avant de lancer un chantier de sécurisation. Mieux vaut d’abord établir une analyse de risque et un plan d’action adapté, ordonnancé et appuyé d’indicateurs de contrôle.

Enfin, nous préconisons de faire appel à nous dans un cadre d’amélioration continue. Nous voyons beaucoup des solutions mises en œuvre sans indicateurs de contrôle de performance. La sûreté est par ailleurs une fonction souvent à l’écart des directions de l’entreprise. Il en résulte qu’elle n’est pas dans la boucle de la gestion des programmes de transformation, de la gestion des changements, qui peuvent quelques fois rendre les solutions mises en œuvre obsolètes ou simplement moins efficaces.


Nous approchons de la fin, souhaitez-vous ajouter un mot ?

Nous constatons globalement une augmentation des incivilités et des violences auprès des personnels en relation avec le public. Il est important en tant qu’employeur de prendre conscience de cette situation et de mettre en œuvre des plans d’actions pour prévenir les risques.


Interview réalisé par Guillaume Moriano, CSM chez Heropolis



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